De retour en Italie après dix ans passés à l'étranger où l'on m'a diagnostiqué une maladie grave, le système de santé italien m'a refusé les médicaments qui me maintiennent en vie. De ce fait, à la trentaine, je souffre aujourd'hui de douleurs chroniques incurables. Mais je suis heureux.
Début 2023, je suis rentré en Italie, après dix ans passés dans plusieurs autres pays. À l'étranger, j'ai développé un caillot sanguin, heureusement sans conséquences à long terme. Suite à cet événement, on m'a diagnostiqué une maladie générique grave (syndrome des antiphospholipides, ou anticoagulant lupique, aussi appelé SAPL ou LAC) qui m'expose à des risques d'événements indésirables tels que des caillots sanguins (thrombose), des embolies et des ischémies. On m'a dit que pour prévenir ces événements, je devrais prendre des anticoagulants à vie. Ces médicaments m'ont été prescrits dans tous les pays où j'ai vécu depuis.
De retour en Italie, je vais chez mon médecin généraliste et j'apporte les résultats des cinq tests LAC positifs effectués à l'étranger. Il me prescrit de poursuivre le traitement anticoagulant. Arrivé à court de doses, je vais à la pharmacie pour en obtenir de nouvelles. On m'annonce que l'ordonnance est expirée. Je retourne ensuite chez mon médecin généraliste, qui me remet une nouvelle ordonnance. Je retourne ensuite à la pharmacie. On m'explique qu'on ne peut pas me prescrire d'anticoagulants sans un plan de traitement. Je demande alors qui doit établir ce plan. On me dit de m'adresser au médecin généraliste. Je retourne donc chez lui avec les cinq résultats positifs. Comme elle est en congé, je discute avec sa remplaçante. Elle m'explique que le plan de traitement doit être établi par un spécialiste d'un hôpital public. Je lui demande quel spécialiste je dois consulter, elle me demande lequel je souhaite consulter, et je lui réponds que j'espérais qu'elle me le dise. Finalement, elle me prescrit des consultations urgentes chez un rhumatologue, un angiologue et un cardiologue. Je prends ces rendez-vous via le système de réservation centralisé des soins de santé publique, et ils me sont attribués respectivement à l'hôpital Sant'Orsola, à l'hôpital Maggiore et dans une clinique de San Lazzaro. J'apporte donc à la rhumatologue de Sant'Orsola les cinq résultats positifs du test LAC, et elle m'explique que ce n'est pas elle qui établit le plan de traitement, mais les angiologues. Je présente donc l'angiologue Alberto Martignani a l'hôpital Maggiore, il m'annonce que ce n'est pas lui qui établit le plan de traitement, mais le Centre des maladies de la coagulation. Je me dis alors : j'ai de la chance de vivre dans un pays où les procédures sont claires et la bureaucratie simplifiée.
Il me dit qu'il me dirigera vers le Centre des maladies de la coagulation s'il est confirmé que je dois poursuivre le traitement avec des anticoagulants. Je lui tends donc les cinq résultats positifs du test. Il jette un coup d'œil à la première ligne de la première page du premier test et me dit : « OK, refaisons le test, faisons un échodoppler et faisons aussi des analyses de sang.» Il me prescrit tous ces examens, me fait revenir une semaine plus tard dans la même salle pour l'échodoppler (ce qui prend deux minutes) et me dit : « L'échodoppler est bon, les analyses de sang sont bonnes, il reste à voir les résultats du test. » Comme ils ne sont pas encore disponibles, il me dit : « Je ne vous oblige pas à prendre un nouveau rendez-vous, venez simplement ici aujourd'hui à telle heure avec les résultats de l'analyse.» Je fais ce qu'on me dit, il regarde les résultats et hausse les épaules en disant : « Le test est négatif, vous n'avez pas besoin de prendre d'anticoagulants, prenez simplement une aspirine si vous prenez l'avion.»
J'arrête donc mon traitement anticoagulant et, au bout de quelques mois, j'ai plusieurs caillots sanguins (thrombose veineuse profonde) qui causent des dommages permanents à la circulation dans ma jambe droite (cicatrisation des veines profondes, perte de certaines valvules). Après cela, je me rends à l'hôpital Sant'Orsola, où l'on me dit que je devrais peut-être prendre des anticoagulants. On me fait repasser le test LAC, et dans l'un des comptes rendus, l'angiologue Alessia Libra mentionne les cinq résultats positifs obtenus à l'étranger et les deux tests réalisés en Italie : « Le patient avait déjà présenté un test LAC positif isolé, non confirmé par deux autres examens de suivi.» Depuis, j'ai consulté sept angiologues différents à l'hôpital Sant'Orsola, dont le directeur du service d'angiologie, Benilde Cosmi. Lors de la dernière consultation, j'ai demandé à l'angiologue Roberta Bortolotti s'il était vrai que le test LAC n'était pas valide lorsqu'il était réalisé, comme cela a été le cas pour ces deux derniers tests en Italie, sur un patient sous anticoagulants ou pendant la phase aiguë de la thrombose. Elle m'a répondu par l'affirmative. En effet, l'article scientifique « Lupus Anticoagulant Detection in Anticoagulated Patients » conclut : « Les anticoagulants oraux directs affectent la détection des LA. Il n'est donc pas recommandé de tenter la détection des LA chez ces patients. [...] Globalement, le test des LA n'est pas recommandé pendant la phase aiguë. » Je pense alors : j'ai la chance de vivre dans un pays où les médecins donnent aux patients toutes les informations concernant leur santé, même si ce n'est qu'à la 10e visite et en réponse à une question précise, et où les diagnostics médicaux ne sont pas posés à la hâte, mais seulement après avoir soigneusement examiné les antécédents médicaux du patient, les informations disponibles et la littérature scientifique pertinente.
Elle me dit que de toute façon chez les jeunes patients, lorsqu'ils font du sport, on essaie de suspendre le traitement avec des anticoagulants, ce qui augmente le risque de saignement. Je me dis donc : j'ai la chance de vivre dans un pays où les médecins se soucient de la santé des jeunes, qu'on accepte sans même qu'on leur demande de pratiquer un sport qui les expose à un risque de saignement, contrairement à l'étranger où j'ai été traitée pendant sept ans avec une dose moyennement faible d'anticoagulants pour me protéger des thromboses, embolies, ischémies et autres complications, et où, parallèlement, mon risque de saignement était faible. J'ai la chance d'être de retour en Italie, où l'on a mis fin à cette folie et suspendu le traitement anticoagulant. Le seul inconvénient est qu'en raison de l'accident thrombotique qui a suivi, je présente un risque accru d'en développer d'autres. C'est pourquoi on me prescrit maintenant une dose plus élevée d'anticoagulants, ce qui augmente le risque de saignement. Sans parler du risque d'autres complications liées à un événement thrombotique récent, telles que des varices, une insuffisance veineuse chronique et des ulcères, sans compter les douleurs chroniques incurables à la jambe droite, que je ressens déjà à 38 ans, jour et nuit, au repos comme en mouvement. En effet, l'article scientifique « Cessation of oral anticoagulants in antiphospholipid syndrome » conclut que « le risque de nouvel événement thrombotique chez les patients atteints de SAPL ayant arrêté leur traitement anticoagulant est élevé, même chez ceux dont les anticorps antiphospholipides ont disparu durablement ». Mais je ne m'attarde pas là-dessus, car j'ai la chance de vivre dans un pays où les décisions médicales, a fortiori celles dont les conséquences sont potentiellement mortelles ou entraînent une invalidité permanente, ne sont pas prises à la légère, mais seulement après avoir pesé le pour et le contre, dans le respect des droits des patients, y compris le droit à l'information. J'ai aussi la chance de profiter de ce qui fait la renommée mondiale de ce pays : ses montagnes, son soleil, ses villes et, surtout, ses caillots sanguins.
P.S.
J'ai partagé ces observations avec l'hôpital Maggiore, l'hôpital Sant'Orsola, l'Ordre des médecins de Bologne, un groupe de défense des droits des patients (Tribunale della Salute), un avocat spécialisé en faute médicale et r/Italia. Ni l'hôpital Maggiore ni l'hôpital Sant'Orsola n'ont reconnu la moindre faute. L'Ordre des médecins de Bologne n'a jamais répondu. L'association a partagé un rapport anonyme, basé lui-même sur le rapport anonyme d'un spécialiste, affirmant que « s'il est vrai que les anticoagulants peuvent interagir avec le test LAC, dans ce cas, le test LAC a été répété ultérieurement et le résultat était à nouveau négatif ». J'ai alors fait remarquer que le deuxième test LAC que j'avais effectué en Italie n'était pas non plus valide, comme indiqué précédemment, mais ils ne m'ont jamais répondu. L'avocat m'a recontacté plusieurs mois plus tard, m'indiquant qu'ils n'avaient trouvé aucun spécialiste disponible pour nous donner un avis juridique, indispensable pour pouvoir demander une indemnisation. Sur Reddit, un médecin a commenté : « En tant que médecin, chaque ligne que vous avez écrite m'a fait bouillir de rage comme jamais auparavant. Cela montre à quel point nous sommes dérangés. Je pense que seul un médecin chroniquement stupide arrêterait le traitement anticoagulant d'un patient testé positif au LAC et qui avait déjà un caillot sanguin. » J'ai alors pensé : j'ai de la chance de vivre dans un pays dont les institutions médicales se soucient avec tant de dévouement, de passion et d'honnêteté de la santé de sa population, un pays où l'on n'a jamais l'impression d'être pris pour un imbécile.